On aurait pu croire que la jeunesse de notre Président de la République et celle de son équipe serait un atout maître notamment en termes de communication. Leur formation, leur connaissance des médias et des réseaux sociaux auraient dû annoncer une ère nouvelle de la communication politique spécialement en temps de crise :
Affaire Benalla, gilets jaunes, grandes grèves de l’automne, réforme des retraites, affaire Delevoye, et maintenant covid 19… Les crises, n’ont en effet, pas manqué.
Hélas, la maîtrise des outils ne suffit pas et « l’expérience et l’intuition » politique ont fait cruellement défaut. Comment expliquer un tel décalage entre le talent incontestable de cette équipe de jeunes quadras pour la prise du pouvoir et l’absence de clairvoyance, de vista, de courage et tellement de maladresses en tant de crise ? Où sont passés les stratèges de l’Elysée, les conseillers de l’ombre, les visiteurs du soir, les créateurs du monde de demain ?
Elu par hasard et par défaut après la chute malheureuse et imprévue du candidat de la droite, le choix entre Emmanuel Macron et la candidate frontiste s’est avéré un non choix. Pourtant, les espoirs étaient énormes, une nouvelle façon de faire de la politique s’annonçait, libérée du clivage stérile gauche droite…. Communiquer pour expliquer et rendre lisibles des choix impérieux, créer une relation de confiance et d’espérance, tels étaient les enjeux de cette nouvelle génération au pouvoir.
La déconvenue est à la mesure ce cette géniale martingale électorale… Etre jeune et malin ne suffit pas à gouverner un pays, en l’occurrence la France, qui est difficilement gouvernable et ontologiquement paradoxal.
Dès le début de la mandature, des signaux faibles laissaient percevoir la distorsion entre le discours et la réalité : la continuité du monde d’avant : la fête avant la victoire à la Rotonde (rive gauche), la cérémonie totalement anachronique de l’intronisation au Louvre, la sortie très irrespectueuse et incompréhensible à l’Hôtel de Brienne devant un parterre de généraux méprisés… Que d’erreurs de communication commises déjà par temps calme.
La constance de ce pouvoir est d’être souvent en décalage avec le momentum. Ne jamais prévoir, ne jamais anticiper, n’écouter personne ou tout le monde, toujours finir par céder après des bras de fer interminables, rattraper à contre-temps, reconnaître difficilement ses faux pas, ne pas sanctionner les erreurs de recrutement ministériel et surtout pratiquer le pouvoir comme avant, sans en avoir l’expérience, tout en promettant au Peuple, après chaque crise majeure, l’air sincère, avoir compris et mettre en œuvre un changement des pratiques (Acte 1, Acte 2 …)
La crise sanitaire que notre pays (avec tant d’autres) a traversée aurait pu être un moment de vérité pour le pouvoir. Événements exceptionnels, réponses exceptionnelles ! Cette période inédite, à laquelle peu de gouvernements étaient préparés (alors qu’elle était prévisible), aurait pu être un moment de retrouvailles entre le Peuple et ses élites. Ce besoin de protection ressenti par une nation menacée, où chacun a peur pour sa vie et celle de ses proches, où chacun a besoin d’être rassuré était une « occasion inespérée » ,pour le pouvoir de démontrer dans ces moments terribles, ses capacités de rassemblement et de vérité.
Là encore, quelle déception ! Tant sur la forme que sur le fond. Je ne m’attarderai pas sur le fond car il est encore trop tôt pour en évaluer l’efficacité même si de nombreuses voix s’élèvent pour infirmer les pseudo résultats de la doxa du confinement versus les dégâts considérables et durables sur le plan économique et social.
En revanche, sur la forme donc sur la communication du gouvernement, que d’erreurs commises : comparer une crise sanitaire à un état de guerre, déléguer ses décisions à un conseil scientifique qui dit tout et son contraire, écouter les diktats de l’Académie de médecine, s’arranger avec l’utilité des masques et tests pour en dissimuler la pénurie et prendre le Peuple entier pour un imbécile, oublier de faire de la politique, ne pas être courageux et audacieux.
Alors oui, on a eu de grands discours lénifiants sur notre protection, sur le choix inédit de la santé d’abord au détriment de l’économie, sur le rôle extraordinaire de nos soignants ( si mal traités il y a quelques mois)….De belles images aussi de notre armée qui organise à coup de millions des ponts aériens pour transporter quelques dizaines de malades dans des pays limitrophes alors que les hôpitaux militaires tels que le Val de Grâce ou Percy n’ont pas été ou très peu sollicités, sans parler du secteur privé (7000 lits de réanimation) qui est resté désespérément vide, victime d’une administration immobile et tatillonne…
Confusion au moment du confinement , cacophonie au moment du déconfinement, communication truffée d’injonctions contradictoires distillées par une kyrielle de ministres (déguisés en maîtres d’école) qui devraient agir en silence plutôt que de répéter à l’envi sur les plateaux de télévision des éléments de language élaborés par des communicants « has been » …
Résultat : plus le pouvoir tente de rassurer, plus les français sont inquiets. Ses atermoiements et ses gesticulations ont jeté le doute sur sa capacité à remettre le pays en marche. Le capital confiance envers le gouvernement est très bas. Au-delà des décisions prises, il récolte les fruits d’une communication mensongère et infantilisante.
La crise économique et sociale à venir va être très dure, et la France pour ne parler que d’elle, va devoir affronter de très profondes difficultés au risque de se perdre . Alors tournons cette page et espérons que le pouvoir en place saura trouver, cette fois ci, la communication juste pour expliquer ses choix et recréer ce climat de confiance indispensable pour sortir du chaos dans lequel nous allons être plongés.
David nitlich