Plaidoyer pour la fin du Ministère de la Culture !
Je n’ai jamais compris à quoi servait un Ministère de la Culture et de la Communication dans un pays démocratique où la libre expression artistique est normalement un des piliers fondamentaux d’une République. La dernière décision de Frédéric Mitterrand d’écarter Céline de l'édition 2011 du Recueil des célébrations nationale me conforte dans mon incompréhension et dans mon rêve de voir un jour ce ministère disparaître, en tous les cas dans sa conception actuelle. Bien sur, il faut sauvegarder notre patrimoine et promouvoir la culture pour tous. Ces deux missions fondamentales pourraient sans difficulté être menées par une direction du patrimoine pour l’une et par le Ministère de l’éducation pour l’autre. Mais de grâce, ne régissons pas les artistes, les œuvres, ne battons pas la mesure de ce qu’il faut voir, lire, écouter...car la censure n’est jamais très loin, et la volte face de Frédéric Mitterrand (écrivain lui aussi, dont le talent littéraire est bien éloigné de celui de Céline) en est un exemple affligeant et inquiétant. Oui, Céline a tenu et écrit des propos d’un antisémitisme virulent pour lesquels il a d’ailleurs été poursuivi judiciairement. Cela n’a pas empêché d’inscrire en 1974, le “Voyage au bout de la nuit” au programme de l'agrégation, ni sa mise en scène au théâtre pendant plusieurs années pour le plus grand plaisir des spectateurs. Tout le monde s’accorde sur le fait que Céline est un écrivain hors du commun, génial et parfaitement abjecte. Ce ne sera ni le premier, ni le dernier et cela pose la question de la compatibilité de la “qualité artistique” et de la “moralité” de tout œuvre d’art. En tous cas ce n’est pas le rôle du Ministère de trancher car ce type de décision est une brèche ouverte à tous les excès communautaristes ambiants. Notre patrimoine culturel risque d’être terriblement amputé si, au nom d’une moralité bien pensante du moment, il faut proscrire ou ne pas célébrer les artistes qui ont abandonné leurs enfants , tenu des propos désobligeants ou déshonorants sur les femmes (ils sont légions), des propos anti-cléricaux ou racistes...bref nous sommes en plein délire. Par ailleurs, j’ai une profonde admiration pour le travail exceptionnel mené inlassablement par Serge Klarsfeld, mais avec tout le respect qu’on lui doit, je pense qu’il se trompe de combat et sa déclaration : "les immondes écrits antisémites de Céline rendaient en effet un tel hommage inadmissible. Frédéric Mitterrand doit renoncer à jeter des fleurs sur la mémoire de Céline, comme François Mitterrand a été obligé de ne plus déposer de gerbe sur la tombe de Pétain” est juste outrancière , n’a aucun sens historique et est certainement contre productive par rapport à la cause légitime qu’il défend. En effet, ce type de pression et de décision qui en découle va accréditer l'idée que le "lobby juif" fait la pluie et le beau temps en France, lobby qui, en France n’est pourtant qu’un phantasme. Alors quelles sont les motivations profondes de Frédéric Mitterrand et de son Ministère ? Outre les déclarations politiquement correctes, nul ne le sera jamais. Dans tous les cas, c’est une faute grave et un acte totalement irresponsable au regard de la cohésion nationale, des nouvelles générations pour qui tout cela est certainement incompréhensible et de l’histoire littéraire de notre pays qui forme un tout. Céline n’est pas Pétain! Ce dernier faux pas décrédibilise encore un peu ce Ministère poussiéreux, à cours d’idées et de grands projets et qui montre bien des faiblesses devant les pressions alors qu’il devrait être un défenseur opiniâtre de toutes les libertés, du moins artistiques.
David Nitlich
